Un pèlerinage en Normandie
Le rendez-vous était fixé à 8 heures place de la mairie de Conflans, le samedi 10 février 2007. Le car et son chauffeur, Jean-Paul, attendaient la soixantaine de participants venus pour faire un pèlerinage sous la direction spirituelle de l'abbé Daniel Vigne, de la chapelle Sainte-Honorine, sur les pas de sainte Honorine en Normandie. Car si c'est à Conflans que se trouvent ses reliques depuis le IXe siècle (et depuis 1801, dans l'église Saint-Maclou), c'est en Normandie qu'elle vécut et fut martyrisée.
Présentation de ce pèlerinage, en images ...
... et par écrit.
Première destination : Mélamare, près de Lillebonne en Seine-Maritime. C'est là que sainte Honorine aurait vécu au IIIe siècle. Les pèlerins y sont accueillis par une sympathique villageoise qui leur présente l'église paroissiale Saint-Jacques. Le souvenir de sainte Honorine y est bien présent, en particulier par quatre vitraux qui présentent sa vie et son martyre. Ensuite, direction Le Havre où les pèlerins assistent à la messe célébrée par l'abbé Vigne dans la chapelle Saint-Grégoire-le-Grand, avant d'être cordialement accueillis dans une salle attenante pour un déjeuner tiré du sac. Sitôt bu le café, retour au car et destination le prieuré Sainte-Honorine de Graville, tout proche.
C'est en effet à Graville, dans l'église de cet ancien prieuré de religieux Augustins, que se trouve le tombeau de sainte Honorine. Après son martyre, le corps de la sainte, jeté dans la Seine, vint s'échouer à cet endroit. Ce corps qui brillait d'un éclat particulier attira l'attention des riverains. Ils le recueillirent, l'ensevelirent au pied de la falaise, construisirent un premier sanctuaire, qui fut remplacé au début du XIIIe siècle par le magnifique prieuré que nous connaissons aujourd'hui. De style roman et récemment restauré, c' est maintenant un musée d'art religieux de Normandie (pour en savoir plus : prieuré de Graville).
La conservatrice du musée accueille le groupe et le fait bénéficier d'une visite guidée. L'église restaurée apparaît maintenant dans toute sa beauté, avec sa nef romane aux chapiteaux historiés et son chevet gothique dans lequel l'autel et le retable du XVIIe siècle ont été réinstallés récemment. Ce retable porte à droite une belle statue en bois peint de sainte Honorine. Une autre statue de la sainte, du XIXe siècle en plâtre, est aussi présente dans le choeur.
Mais le vestige le plus émouvant, c'est bien sûr son tombeau, un sarcophage en pierre du IVe ou Ve siècle, placé dans un enfeu du côté gauche du choeur ; c'est de ce tombeau que furent extraites à la hâte les reliques, en 876, lors de l'attaque des envahisseurs normands. Chargées sur le dos d'un cheval, elles trouvèrent asile à Conflans où elles sont conservées depuis lors. Au Moyen Age, un trou circulaire a été pratiqué sur le côté du tombeau pour permettre aux pèlerins d'y passer la tête. Cette pratique avait la propriété, disait-on, de guérir les sourds.
A l'extérieur du prieuré, une statue géante de la Vierge portant l'Enfant-Jésus veille sur l'estuaire de la Seine. Elle est due à l'initiative d'une riche havraise qui avait fait voeu d'en financer la réalisation si la ville du Havre était épargnée par la guerre de 1870. Constituée selon les techniques de l'époque, de tôle d'acier formée sur une charpente métallique, elle n'a pas résisté à l'épreuve du temps et a dû être refaite récemment à l'identique. Elle est particulièrement vénérée par les Havrais, comme en témoignent les nombreux ex-voto de toute nature qui sont déposés sur l'autel de l'oratoire voisin.
De Graville au Bec-Hellouin, il n'y a qu'un pas ... et un pont à franchir, en l'occurrence le pont de Tancarville. L'abbaye du Bec-Hellouin, dans le département de l'Eure, n'est qu'indirectement rattachée à l'histoire de sainte Honorine : c'est l'abbaye bénédictine mère du prieuré de Conflans. En 1080, Lorsque le seigneur de Conflans, Yves le Clerc, cherche des moines pour garder les reliques (qui sont à Conflans depuis déjà deux siècles) et pour accueillir les pèlerins toujours plus nombreux à venir les vénérer, c'est à Anselme, le prestigieux abbé du Bec, qu'il s'adresse. Anselme, le futur saint et docteur de l'Eglise, lui envoie un "essaim" de moines pour fonder ce nouveau prieuré. C'est le début d'une longue histoire entre la mère (Le Bec) et la fille (Conflans) qui justifiait bien qu'un pèlerinage sur les pas de sainte Honorine s'y arrêtât.
Désertée et laissée à l'abandon à la Révolution, l'abbaye du Bec a retrouvé une vie monastique après la dernière guerre et est aujourd'hui à nouveau habitée par des moines bénédictins qui se consacrent à la prière, à l'étude et à l'artisanat (faïence). Là encore les pèlerins reçurent un accueil chaleureux et ils furent même autorisés à franchir la clôture et à pénétrer dans la partie du monastère en principe réservée aux moines. Ils purent ainsi faire le tour du magnifique cloître du XVIIe et entendre les commentaires de la bouche du moine venu les accueillir.
Pour le voyage de retour de Normandie à Conflans, les pèlerins n'emprunteront pas, comme les reliques de sainte Honorine, l'ancienne voie romaine à cheval, mais l'autoroute en car. Ils poursuivront la récitation du rosaire (trois chapelets : mystères joyeux, douloureux et glorieux de la vie du Christ) commencée à l'aller, soutenus par les méditations de l'abbé Vigne.